Date de publication : 17/09/24
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Des chercheurs de l’Unité ImmunoRhumatologie Moléculaire (Inserm/Unistra), dirigée par le Professeur Seiamak Bahram, mettent en évidence une mutation génétique rare mais récurrente dans le gène ITPR3. Celle-ci est à l'origine d'un trouble complexe, touchant plusieurs organes et associé à une immunodéficience sévère. Outre son intérêt dans le diagnostic des patients présentant cette maladie complexe aux manifestations variées, ce travail ouvre la voie à de nouvelles pistes de recherche et de traitement concernant les mécanismes sous-jacents ainsi que sur le rôle du récepteur IP3R3 dans la régulation du calcium intracellulaire, avec une possible implication à grande échelle dans des maladies courantes.
Lien vers la publication scientifique : https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.ado5545
Le calcium joue un rôle crucial dans le maintien de l’homéostasie des cellules et de l’organisme, c’est à dire dans la capacité à maintenir un équilibre interne stable malgré les variations de l’environnement. Il est ainsi indispensable à de nombreux fonctionnements physiologiques, notamment la contraction musculaire, la neurotransmission, la formation osseuse ou encore la réaction immunitaire.
« Il n’est donc pas surprenant que les défauts génétiques touchant différentes voies impliquées dans la régulation du calcium puissent entraîner des immunodéficiences graves, compromettant entre autres la capacité du patient à se défendre efficacement contre les infections », explique le Professeur Seiamak Bahram, par ailleurs responsable de l’Institut Thématique Interdisciplinaire (ITI) Transplantex NG dont les plateformes ont permis la réalisation des analyses moléculaires dans cette étude.
Un dysfonctionnement du récepteur IP3R3 génère une maladie complexe et multisystémique
Le récepteur IP3R[1] est essentiel pour la libération du calcium à l’intérieur de nos cellules à partir de ses organelles de stockage (réticulum endoplasmique, mitochondries), un processus crucial pour de nombreuses fonctions cellulaires.
Chez quatre patients non apparentés provenant de divers continents, les chercheurs ont identifié une mutation identique au niveau du récepteur IP3R3, dominante (une seule copie de cette mutation est nécessaire et suffisante à générer cette maladie), qui provoque un dysfonctionnement de ce récepteur par un effet dit dominant-négatif*. Ce dysfonctionnement entraîne une perturbation de l'homéostasie calcique, un mauvais fonctionnement des mitochondries, les centrales énergétiques de nos cellules, ainsi qu'une baisse significative des cellules de l’immunité, les lymphocytes CD4 et une quasi-absence des cellules naïves CD4 et CD8.
Bien que les patients partagent une immunodéficience sévère, ils présentent également des atteintes variées, telles que la dysplasie ectodermique (des maladies héréditaires caractérisées par des anomalies du développement des dents, des ongles, des follicules pileux et de glandes sudoripares), la maladie de Charcot-Marie-Tooth (une maladie neurologique héréditaire du nerf périphérique qui entraine une diminution de la force musculaire et de la sensibilité), une petite taille, et une aplasie médullaire (un dysfonctionnement de la moelle osseuse).
Les travaux des chercheurs montrent que cette mutation spécifique du récepteur IP3R3 joue un rôle unique au sein du complexe de récepteurs IP3R, se distinguant ainsi des autres mutations connues dans les gènes ITPR1, ITPR2 et ITPR3, qui sont essentiellement à l’origine de maladies neurologiques. C’est la première fois que des scientifiques observent l’implication directe du récepteur IP3R3 dans la genèse d’une maladie immunologique.
Perspectives thérapeutiques
Cette découverte ouvre la voie à de nouvelles approches thérapeutiques pour les patients atteints de cette maladie rare. Une compréhension approfondie des mécanismes impliqués pourrait également contribuer à éclaircir d'autres troubles associés à des mutations des récepteurs IP3R, que l'on retrouve non seulement dans des maladies rares, mais aussi dans des affections plus courantes.
*effet dominant négatif : un effet dominant négatif est le résultat d'une mutation présente sur un seul des deux exemplaires d’un gène (allèle). Cette mutation entraîne la production d'une protéine anormale qui perd sa fonction, et qui interfère avec la fonction de protéine produite à partir de l'allèle normal. Ce type de mutation se rencontre souvent dans des gènes qui codent des protéines structurelles ou des protéines capables de former des paires. La protéine anormale interfère avec la fonction de la protéine normale en modifiant sa structure.
[1] Le récepteur IP3R : de l'inositol 1,4,5-trisphosphate IP3 récepteur IP3R, dont la sous-unité IP3R3 est codée par le gène ITPR3.
Contact scientifique :
Unité d’ImmunoRhumatologie Moléculaire (UMR_S 1109)
Seiamak Bahram, PU-PH
Directeur de l’Unité
siamak@unistra.fr
Contacts presse :
Université de Strasbourg : Mathilde Hubert | mathilde.hubert@unistra.fr
Inserm : Simon Tenaud | simon.tenaud@inserm.fr
Hôpitaux Universitaires de Strasbourg : Gael Chica | gael.chica@chru-strasbourg.fr
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