Lorenzo Turelli compte parmi les huit docteurs distingués par le Chapitre de Saint-Thomas cette année. Le prix Jean Kepler vient récompenser ses recherches sur le cancer et plus précisément son étude de nouveaux motifs d’espaceurs dans la construction de conjugués anticorps-médicaments. Entretien avec ce post-doctorant au laboratoire de chémo-biologie synthétique & thérapeutique (CBST UMR 7199 – Université de Strasbourg/CNRS).
Parlez-nous des conjugués anticorps-médicaments, pourquoi sont-ils si prometteurs en médecine ?
Les conjugués anticorps-médicaments (ADC) représentent une classe thérapeutique en pleine expansion dans le domaine de l'oncologie. Ils sont composés d'un anticorps monoclonal (mAb) lié de manière covalente à un médicament cytotoxique par l'intermédiaire d'un espaceur (linker). L'avantage de cette classe thérapeutique réside dans la reconnaissance sélective par le mAb d'un type précis d'antigènes surexprimés par les cellules cancéreuses, limitant ainsi les effets indésirables des chimiothérapies classiques.
En quoi vos travaux de recherche s'inscrivent-ils dans les valeurs du Chapitre de Saint-Thomas ?
Le but de mes recherches est d'apporter une contribution, même modeste, à l'une des maladies les plus répandues de notre époque, et de nourrir ainsi l'espoir d'améliorer la condition des personnes atteintes de cancer. En même temps, en pleine union avec les valeurs d'éducation et de partage du Chapitre de Saint-Thomas, les résultats obtenus sont le fruit d'une collaboration avec les excellents chercheurs du groupe BFC (Chimie BioFonctionnelle), sans qui rien n'aurait été possible.
Que représente pour vous ce prix ?
Très souvent, l'activité de recherche implique des années de travail avant d'aboutir à un résultat significatif. Elle passe par des échecs, des changements de plan, de nombreux essais et exige, en particulier, une constance dans le temps. Le fait qu'une institution telle que le Chapitre de Saint-Thomas reconnaisse n'est pas seulement une source d'inspiration, mais rend justice à un travail autrement invisible. Pour une œuvre primée comme la mienne, il y en a beaucoup d'autres, certainement aussi bonnes, qui attendent d'être dévoilées.
Plus d'informations
Les lauréats 2024 :
Prix Jean Kepler : sciences et technologies - M. Lorenzo Turelli
Étude de nouveaux motifs d'espaceurs dans la construction de conjugués anticorps-médicaments.
Prix Albert Schweitzer : médecine (et/ou sciences de la vie et de la santé) - M. Yannick Dieudonné
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Bon à savoir
Qu’est-ce que le Chapitre de Saint-Thomas ?
Situé sur le quai Saint-Thomas, cette institution bientôt millénaire a été sécularisée en l’an 1031. Le « Chapitre » est alors fondé pour gérer les biens de l’Église ; sa mission principale était la gestion du fonctionnement des églises Saint-Thomas, Saint-Aurélie et Saint-Nicolas.
En 1524, avec l’avènement de la Réforme, le Chapitre devient protestant. Aujourd’hui, le Chapitre de Saint-Thomas est une œuvre strasbourgeoise rattachée à l’Église protestante de la confession d’Augsbourg d’Alsace et de Lorraine. Il est la plus ancienne et la plus originale institution du protestantisme français, ayant adopté la Réforme sept ans seulement après la publication des 95 thèses de Martin Luther.
C’est le seul chapitre protestant existant en France. Il gère aujourd’hui 26 fondations qui ont pour missions :
- la contribution à l’effort collectif de formation par l’aide à l’enseignement et le soutien scolaire, par une attention prioritaire à la formation, de tous niveaux, de toute nature ;
- l’aide à la formation des serviteurs de l’église ;
- le développement et renouvellement du témoignage et de la présence ecclésiale, notamment auprès des jeunes, (former aujourd’hui les cadres de l’église de demain) ;
- la conservation et la transmission du patrimoine intellectuel et spirituel ;
- la contribution à la mutualisation des compétences entre les institutions, œuvres, paroisses.
Chaque année, depuis 2005, il remet sept prix de thèses, pour soutenir les travaux universitaires en lien avec les principes humanistes et qui participent à améliorer la vie de la cité. Chaque prix, doté à hauteur de 2 000 €, couvre un champ de recherche spécifique et porte le nom d’une personnalité en lien avec le Chapitre ou le protestantisme.