La commission de la recherche réunie le 15 mai a validé à l’unanimité le soutien de l’Université de Strasbourg à l’infrastructure de recherche Epos-France. Il s’agit de la branche française de l'European plate observing system (EPOS), une infrastructure de recherche européenne dédiée à la science interdisciplinaire de la Terre solide. Epos-France rassemble les communautés scientifiques françaises travaillant dans le domaine des géosciences et coordonne sa participation dans EPOS. Entretien avec Jérôme Vergne, physicien à l’Institut Terre et environnement de Strasbourg (Ites - CNRS/Unistra/Engees) qui a participé activement au développement d’Epos-France.
Quels sont les outils et infrastructures que développent le réseau EPOS en France et en Europe ?
Epos-France est une infrastructure de recherche intégrée au dispositif européen EPOS qui regroupe, au sein d’un système unifié, toute une variété de moyens instrumentaux qui permettent d’observer, d’analyser et de surveiller les manifestations des processus dynamiques affectant la Terre interne. Ce dispositif se compose de plusieurs éléments, tous complémentaires. On a d’abord, des réseaux permanents de capteurs in-situ, tels que des stations sismologiques, géodésiques et gravimétriques, répartis sur l’ensemble du territoire français. Nous utilisons également des moyens d’observations ex-situ, principalement par satellite, et avons la possibilité de déployer temporairement des instruments mobiles sur des cibles spécifiques. Enfin, ce dispositif inclut des moyens expérimentaux de laboratoire.
Epos-France et EPOS proposent un accès ouvert et interopérable à ces données ainsi qu’à des outils et produits d'analyse et de modélisation. Ces ressources sont destinées à soutenir des recherches scientifiques multidisciplinaires visant à améliorer notre compréhension de la structure et de la composition du sous-sol, ainsi que des processus physiques qui régissent la dynamique de la surface terrestre. Elles permettent ainsi de mieux comprendre les phénomènes tels que les tremblements de terre, les éruptions volcaniques et autres aléas telluriques comme les glissements de terrain et les tsunamis.
Quel est le rôle de l’Université de Strasbourg et du site strasbourgeois dans Epos-France ?
Au travers de sa composante École et observatoire des sciences de la Terre (Eost), l’Université de Strasbourg est un acteur majeur d’Epos-France. Dans le domaine de la sismologie par exemple, l’EOST assure le pilotage technique du réseau large bande permanent (RLBP) et coordonne le BCSF-Rénass, service national d’observation qui analyse en continu l’activité sismique sur notre territoire. L’EOST opère également des stations géodésiques permanentes et des gravimètres, dont certains fonctionnent en continu depuis presque 40 ans.
Il est aussi prévu que de nouvelles activités d'observation menées à l'Eost soient intégrées à Epos-France, dans les domaines du géomagnétisme, de l'imagerie satellitaire ou encore des aléas anthropiques. Ce dernier axe devrait notamment intégrer les problématiques liés à l’exploitation des réservoirs profonds, thématique centrale de l’ITI Géosciences pour la transition énergétique (GeoT).
Quels sont les projets de recherche les plus prometteurs actuellement menés au sein d’Epos-France, et comment ces projets contribuent-ils à notre compréhension de la Terre solide et des processus géologiques ?
Ils sont nombreux !
Cette dernière décennie a amorcé une révolution à la fois technologique et méthodologique de l’imagerie de l’intérieur de la Terre en termes de résolution spatiale, en ajoutant la dimension temporelle permettant de « voir » en quatre dimensions la structure fine de divers objets (failles, volcans, aquifères...). L’instrumentation géophysique dans le domaine marin, qui représente les deux-tiers de la surface terrestre, reste un challenge majeur, mais des instruments de nouvelle génération et l’utilisation de fibres optiques devraient bientôt permettre de mieux comprendre ce domaine. Ces développements sont au cœur du programme EquipEx+ MARMOR adossé à Epos-France.
Au travers d’une approche pluridisciplinaire, Epos-France ambitionne aussi d’améliorer la caractérisation des aléas naturels et la gestion intégrative des risques. Un des enjeux scientifiques réside dans la détection de précurseurs fiables d’évènements catastrophiques telles que les éruptions volcaniques, les séismes et instabilités gravitaires et la compréhension du rôle des forçages externes. Il s’agit par exemple de mieux comprendre la réponse du sous-sol aux différents forçages anthropiques (injection de fluides dans le sous-sol, mise en eau de barrages, exploitation minière, etc.) qui peuvent générer des séismes induits.